Bilan 2001 des changements climatiques :
Rapport de synthèse
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Question 5 

Que sait-on au sujet de l’inertie et des échelles temporelles associées aux changements des systèmes climatiques, écologiques et des secteurs socio-économiques et de leurs interactions?

   

L’inertie est une caractéristique inhérente généralisée des systèmes climatiques, écologiques et socio-économiques en inter-action. Ainsi, certains effets des changements climatiques anthropiques ne deviendront apparents que lentement, alors que d’autres peuvent ê tre irréversibles si le rythme et l’ampleur des changements climatiques ne sont pas limités avant le dépassement de seuils associés dont la position peut être mal connue.

Q5.1-3 & Q5.12-15
   

Inertie des systèmes climatiques

 
   
La stabilisation des émissions de CO2 à des niveaux proches des niveaux actuels ne conduira pas à la stabilisation de la concentration atmosphérique du CO2, alors que la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre à durée de vie plus faible, tels que le CH4, conduira, en quelques décennies, à une stabilisation de leurs concentrations atmosphériques. La stabilisation des concentrations de CO2, quel que soit le niveau retenu, exige une réduction éventuelle des émissions nettes de CO2 jusqu’à un faible pourcentage de leur niveau actuel. Plus le niveau de stabilisation choisi est bas, plus les mesures de réduction des émissions nettes mondiales de CO2 doivent être prises rapidement (voir Figure RID–5). Q5.2 & Q5.4
   
Après stabilisation de la concentration atmosphérique de CO2 et d’autres gazà effet de serre, la température de l’air à la surface devrait continuer d’augmenter d’un dixième de degré par siècle pendant cent ans ou plus, et le niveau de la mer devrait continuer de s’élever pendant des centaines d’années (voir Figure RID–5). En raison de la lenteur du transfert thermique dans les océans et de la réaction des inlandsis, un nouvel équilibre du système climatique ne sera atteint que dans très longtemps. Q5.3
   

Certains changements climatiques, plausibles au-delà du XXIe siècle, seraient en fait irréversibles. Par exemple, une fonte importante des inlandsis (voir Question 4) et une modification fondamentale de la circulation océanique (voir Question 4) ne pourraient pas être inversées pendant des générations. Le seuil de modification fondamentale de la circulation océanique peut être atteint à un degré de réchauffement inférieur dans le cas d’un réchauffement non pas progressif mais rapide.

Figure RID–5: Après réduction des émissions de CO2 et stabilisation des concentrations atmosphériques, la température de l’air à la surface continue d’augmenter lentement pendant un siècle ou plus. La dilatation thermique des océans se poursuit bien après la réduction des émissions de CO2, et la fonte des inlandsis continue de contribuer à l’élévation du niveau de la mer pendant plusieurs siècles. Cette Figure est une illustration générique pour une stabilisation entre 450 et 1 000 ppm et par conséquent l’axe Réponse n’a pas d’unités. Les réponses aux trajectoires de stabilisation dans cette fourchette indiquent des trajectoires temporelles généralement similaires, mais les incidences deviennent progressivement plus importantes avec des concentrations plus élevées de CO2.

Q5.3 & Q5.13-16

 
Inertie dans les systèmes écologiques  
   
Dans le cas de certains écosystèmes, les effets de l’évolution climatique peuvent ê tre visibles rapidement, alors que pour d’autres écosystèmes, ils ne deviendront é vidents que plus lentement. Le blanchissement du corail, par exemple, peut se produire au cours d’une saison exceptionnellement chaude, alors que des organismes à durée de vie plus longue, tels que les arbres, peuvent perdurer pendant des décennies en dépit de l’évolution climatique, mais sans pouvoir se régénérer. Des écosystèmes soumis à des changements climatiques, y compris des modifications de la fréquence des phénomènes extrêmes, peuvent être perturbés du fait de la variabilité du temps de réponse des espèces. Q5.7 & Q3 Table 3-2
   
Selon certains modèles du cycle du carbone, l’absorption terrestre nette de carbone mondiale devrait culminer au cours du XXIe siècle, avant de se stabiliser ou de diminuer. L’absorption de CO2 nette mondiale récente par les écosystèmes terrestres est due en partie aux décalages temporels entre l’augmentation de la croissance végétale et la mort et le pourrissement des végétaux. L’amélioration actuelle de la croissance végétale résulte en partie des effets fertilisateurs des dépôts accrus de CO2 et d’azote, et de l’évolution climatique et des changements de l’affectation des terres. L’absorption diminuera au fur et à mesure que les forêts parviendront à maturité, que les effets fertilisateurs atteindront un point de saturation et que la décomposition rattrapera la croissance. Les changements climatiques diminueront probablement l’absorption terrestre nette de carbone à l’échelle mondia-le. Bien que le réchauffement réduise l’absorption de CO2 par les océans, l’absorption nette de carbone par les océans devrait se poursuivre, en conjonction avec une augmentation du CO2 atmosphérique, au moins pendant le XXIe siècle. Le transfert du carbone entre la surface et les grandes profondeurs océaniques prend des siècles, et, à ce niveau, son équilibre avec les sédiments océaniques prend des milliers d’années. Q5.5-6

 
Inertie dans les systèmes socio-économiques  
   
Contrairement aux systèmes climatiques et écologiques, l’inertie au sein des systèmes humains n’est pas fixe, mais peut être modifiée par des politiques et par des choix individuels. La capacité de mise en œuvre des politiques sur les changements climatiques dépend de l’interaction entre les structures et les valeurs socio-économiques, les institutions, les technologies et l’infrastructure en place. En général, l’ensemble du système é volue relativement lentement. Il peut répondre rapidement aux pressions, mais cette réponse s’avère souvent coûteuse (dans le cas, par exemple du remplacement prématuré de biens d’équipement). Lorsque le changement est plus lent, les coûts peuvent être moins élevés, en raison de l’évolution technologique ou de l’amortissement total des biens d’équipement. En règle générale, des années ou des décennies séparent la perception de la nécessité d’une réponse à un problème important, la planification, les recherches et le développement d’une solution et sa mise en œuvre. Des mesures anticipées, basées sur une connaissance des faits, peuvent améliorer les chances de disposer des technologies appropriées en temps utile. Q5.9-12
   
Le développement et l’adoption de nouvelles technologies peuvent être accélérés par des politiques de transfert de technologies et des politiques de soutien dans le domaine fiscal et de la recherche. Le remplacement des technologies peut être retardé par des systèmes « figés » qui présentent des bénéfices commerciaux résultant des institutions, services, et infrastructures en place et des ressources disponibles. L’utilisation précoce de technologies en évolution rapide permet de réduire les coûts de la courbe d’apprentissage. Q5.9 & Q5.21
 

Conséquences de l’inertie sur les politiques

 
 

En raison de l’inertie et de l’incertitude au sein des systèmes climatiques, é cologiques et socio-économiques, l’étude des marges de sécurité doit être intégrée à l’établissement de stratégies, objectifs et programmes, afin de prévenir des niveaux dangereux de perturbation du système climatique. Par exemple, les objectifs de stabilisation de la concentration de CO2, de la température, ou du niveau de la mer peuvent être influencés par:

  • L’inertie du système climatique, qui entraînera la poursuite des changements climatiques pendant un certain temps après la mise en œuvre de mesures d’atténuation;
  • Les incertitudes liées aux seuils possibles de changements irréversibles et au comportement du système à proximité de ces seuils;
  • Les décalages temporels entre l’adoption et la réalisation d’objectifs d’atténuation.

De même, les décalages temporels entre l’identification des incidences des changements climatiques, le développement de stratégies d’adaptation efficaces, et la mise en œuvre de mesures d’adaptation ont des répercussions sur l’adaptation.

Q5.17-19 & Q5.22
   
Du fait de l’inertie dans les systèmes climatiques, écologiques et socio-économiques, l’adaptation est inévitable et déjà indispensable dans certains cas, et cette inertie a des effets sur l’éventail optimal de stratégies d’adaptation et d’atténuation. Les conséquences de l’inertie diffèrent selon qu’il s’agit d’adaptation ou d’atténuation – l’adaptation étant principalement orientée vers une réponse à des effets localisés des changements climatiques, alors que l’atténuation vise à répondre aux incidences sur le système climatique. Ces conséquences ont des répercussions sur l’éventail d’options de politiques les plus économiques et les plus équitables. Des stratégies de couverture et la prise de décisions séquentielle (mesures itératives, évaluation et mesures révisées) peuvent être des réponses appropriées à la combinaison de l’inertie et de l’incertitude. Face à l’inertie, en ce qui concerne les changements climatiques, des mesures d’adaptation ou d’atténuation bien fondées sont plus efficaces, et peuvent quelquefois être moins coûteuses, si elles sont prises plus tôt. Q5.19 & Q5.22
   
L’omniprésence de l’inertie et le risque d’irréversibilité dans les systèmes climatiques, écologiques et socio-économiques interactifs justifient en grande partie l’utilité des mesures d’adaptation et d’atténuation anticipatoires. Si les mesures sont différées, certaines possibilités d’adaptation et d’atténuation peuvent être perdues à jamais. Q5.23


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