17. Pour mettre en œuvre avec succès
les mesures d'atténuation des gaz à effet de serre, il convient
de surmonter de nombreux obstacles d'ordre technique, économique, politique,
culturel, social, comportemental et/ou institutionnel s'opposant à une
exploitation complète des possibilités techniques, économiques
et sociales qu'offrent ces mesures. Les possibilités d'atténuation
et les types d'obstacles varient selon les régions et les secteurs ainsi
qu'avec le temps, en raison des fortes variations de la capacité d'atténuation.
Les pauvres d'un pays donné disposent de possibilités limitées
d'adopter des techniques ou de transformer leur comportement social, surtout
s'ils ne s’inscrivent pas dans une économie marchande. La plupart
des pays pourraient bénéficier d'un financement novateur, d'une
réforme institutionnelle et d'une suppression des obstacles au commerce.
Dans les pays industrialisés, les futures possibilités consistent,
pour l'essentiel, à éliminer les obstacles sociaux et comportementaux.
Dans les pays à économie en transition, elles consistent à
rationaliser les prix. Dans les pays en développement, elles consistent
à rationaliser les prix, à élargir l'accès à
l'information, à offrir des techniques évoluées, des ressources
financières, une formation et un renforcement des capacités. Dans
tout pays, cependant, il existe des possibilités d'éliminer toute
combinaison d'obstacles (sections 1.5,
5.3, 5.4).
18. Sur le plan national, les réactions
aux changements climatiques peuvent gagner en efficacité si elles se
présentent sous la forme d'un ensemble d'outils d'intervention visant
à limiter ou à réduire les émissions de gaz à
effet de serre. Ces outils peuvent comprendre, selon la situation nationale,
des taxes sur les émissions, le carbone et l'énergie, des permis
d'émission négociables ou non, l'attribution et/ou la suppression
de subventions, des consignes, les normes de technologie ou de performance,
des conditions de répartition des sources d'énergie, l'interdiction
de produits, des accords volontaires, des dépenses et des investissements
publics et un appui à la recherche-développement. Chaque gouvernement
peut adopter des critères d'évaluation distincts, susceptibles
de conduire à la mise en place de divers ensembles d'instruments. La
documentation en général n'accorde pas de préférence
à certains outils d'intervention. Les instruments du marché peuvent
être efficaces par rapport au coût dans de nombreux cas, surtout
si l'on développe la capacité de les administrer. Les normes concernant
le rendement énergétique et la réglementation relative
aux résultats, largement employées, peuvent être efficaces
dans de nombreux pays et précèdent parfois les instruments fondés
sur le marché. Récemment, on a fait davantage appel à des
accords volontaires, qui ont parfois précédé l'adoption
de mesures plus rigoureuses. On met de plus en plus l'accent sur les campagnes
d'information, l'étiquetage écologique et les campagnes de publicité
faisant appel à des arguments écologiques, de façon indépendante
ou en association avec des subventions d'incitation, pour informer les consommateurs
et les fabricants et faire évoluer leur comportement. La recherche-développement
d'Etat et/ou privée est importante pour faire progresser l'application
à long terme et le transfert de technologies d'atténuation au-delà
du potentiel actuel du marché ou de l'économie (section
6.2).
19. On peut accroître l'efficacité
des mesures d'atténuation des changements climatiques en intégrant
les politiques climatiques aux objectifs non climatiques des politiques nationales
et transformer ces mesures en vastes stratégies de transition afin d'aboutir
aux transformations sociales et techniques à long terme qu'exigent le
développement durable et l'atténuation des changements climatiques.
De même que les politiques climatiques peuvent offrir des avantages accessoires
qui amélioreront le bien-être, de même les politiques non
climatiques peuvent donner lieu à des avantages climatiques. Il serait
peut-être possible de réduire sensiblement les émissions
de gaz à effet de serre en poursuivant des objectifs climatiques par
l'intermédiaire de politiques socio-économiques d'ordre général.
Dans de nombreux pays, l'intensité de carbone des systèmes énergétiques
peut varier en fonction des programmes généraux de développement
de l'infrastructure énergétique, de la fixation des prix et de
la politique fiscale. L'adoption de techniques de pointe écologiquement
rationnelles offre des possibilités particulières de développement
conciliable avec l'environnement tout en évitant les activités
fortes productrices de gaz à effet de serre. Il est possible de favoriser
le transfert de ces technologies vers des petites et moyennes entreprises. En
outre, la prise en compte des avantages accessoires dans des stratégies
globales de développement national peut réduire les obstacles
politiques et institutionnels auxquels sont confrontées les institutions
s'occupant du climat (sections 2.2.3,
2.4.4, 2.4.5,
2.5.1, 2.5.2,
10.3.2, 10.3.4).
20. Des mesures coordonnées entre
les pays et les secteurs peuvent contribuer à réduire les coûts
de l'atténuation et à aborder les problèmes de compétitivité,
les conflits potentiels avec les règles du commerce international et
le transfert d'émissions de carbone. Un groupe de pays qui cherche à
limiter ses émissions collectives de gaz à effet de serre peut
décider d'adopter des instruments internationaux bien conçus.
Les instruments évalués dans le présent rapport et élaborés
dans le Protocole de Kyoto sont l'échange de droits d'émission,
la mise en œuvre conjointe et le mécanisme pour un développement
“propre”. D'autres instruments internationaux sont également
évalués dans le présent rapport : des taxes coordonnées
ou harmonisées sur les émissions, le carbone et l'énergie,
une taxe sur les émissions, le carbone et l'énergie, des normes
relatives aux produits et aux techniques, des accords volontaires avec l'industrie,
des transferts directs de ressources financières et de technologies et
la création coordonnée d'un environnement dynamique incitant par
exemple à la réduction des subventions sur les combustibles fossiles.
A ce jour, certains de ces instruments n'ont été envisagés
que dans certaines régions (sections 6.3,
6.4.2, 10.2.7,
10.2.8).
21.La prise de décisions sur les changements
climatiques constitue pour l'essentiel un processus séquentiel entaché
d'incertitude. Selon la documentation, une stratégie prudente de
gestion des risques exige une prise en compte soigneuse des conséquences
(tant écologiques qu'économiques), de leur probabilité
d'occurrence et de l'attitude de la société par rapport à
de tels risques. Cette attitude est susceptible de varier selon les pays et
peut-être même selon les générations. Nous confirmons
ici les constatations du deuxième Rapport d'évaluation selon lequel
l'amélioration des informations sur les processus et les incidences des
changements climatiques et les réactions de la société
par rapport à ceux-ci sont susceptibles d'avoir une grande valeur. Des
décisions à propos des politiques climatiques à court terme
sont en cours d'adoption alors que l'objectif de la stabilisation est toujours
en cours de discussion. La documentation propose une solution pas à pas
pour stabiliser la concentration des gaz à effet de serre. Il faudra
pour cela équilibrer les risques d'une action insuffisante ou excessive.
La question qui se pose est non pas “Quelle est la meilleure voie pour
les 100 prochaines années?”, mais “Quelle est la meilleure
voie à court terme, étant donné les changements climatiques
prévus à long terme et les incertitudes connexes?”(section
10.4.3).
22. Nous confirmons ici les constatations du
deuxième Rapport d'évaluation selon lequel un ensemble de mesures
précoces comprenant l'atténuation des émissions, la mise
au point de techniques et la réduction des incertitudes scientifiques
donnent davantage de souplesse aux actions de stabilisation de la concentration
de gaz à effet de serre dans l'atmosphère. La combinaison
appropriée de mesures varie avec le temps et selon l'endroit. Des études
de modélisation économique effectuées depuis le deuxième
Rapport d'évaluation indiquent qu'à court terme, une évolution
progressive du système énergétique mondial actuel vers
une économie émettant moins de carbone minimise les coûts
associés à la réforme prématurée des investissements
actuels. Elle laisse également du temps pour mettre au point des techniques
et évite de se fixer prématurément sur des versions périmées
de techniques peu polluantes à la progression rapide. D'un autre côté,
des mesures plus promptes à court terme réduiraient les risques
pour l'environnement et pour l'homme d'une évolution rapide du climat.
En outre, elles favoriseraient une mise en place plus prompte des techniques
peu polluantes actuelles, inciteraient fortement, à court terme, à
une évolution technique susceptible d'éviter qu'on se fixe sur
des techniques à forte intensité de carbone et permettraient un
renforcement ultérieur des objectifs, si l'on juge que cela est souhaitable
à la lumière de la progression de la compréhension scientifique
(sections 2.3.2, 2.5.2,
8.4.1, 10.4.2,
10.4.3).
23. Il existe un rapport entre l'efficacité
écologique d'un régime international, l’efficacité
par rapport au coût des politiques climatiques et l'équité
de l'accord. On peut concevoir tout régime international de façon
à en accroître l'efficacité et l'équité. La
documentation, analysée dans le présent rapport, sur la formation
de coalitions au sein des régimes internationaux présente diverses
stratégies conformes à ces objectifs et indique notamment comment
rendre plus attrayante l'adhésion à un régime grâce
à une répartition appropriée des activités et à
l'adoption de stimulants. Si l'analyse et les négociations portent souvent
sur la réduction des coûts du système, il est également
reconnu dans la documentation que la mise en place d'un régime efficace
en ce qui concerne les changements climatiques doit tenir compte du développement
durable et de questions non économiques (sections 1.3,
10.2).
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