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La réaction des cultures aux changements climatiques varie beaucoup selon les espèces, les cultivars, les conditions du sol, la gestion des effets directs du CO2 et d’autres facteurs locaux. Il est établi, avec un degré de confiance moyen, qu’un réchauffement de quelques degrés Celsius («a few») entraînera une hausse générale du rendement dans les zones tempérées, avec quelques variations régionales (tableau 5-4). Advenant une élévation plus forte des températures, la réaction devient globalement négative. L’adaptation agronomique autonome limite la baisse de rendement dans les zones tempérées et accentue en général les gains (figure TS 4). Pour ce qui est des zones tropicales, où les températures sont proches des valeurs maximales tolérées par certaines cultures et où domine l’agriculture non irriguée, le rendement diminuerait de façon globale, même avec une hausse minime des températures; il serait encore plus durement affecté dans les régions confrontées à une nette baisse des précipitations (degré de confiance moyen). Il est établi avec un degré de confiance moyen que le rendement des cultures tropicales tend à être moins touché par les changements climatiques quand survient une adaptation agronomique autonome, mais il reste généralement inférieur aux niveaux de référence. Les événements extrêmes auront également une incidence. Les températures minimales plus élevées profiteront à certaines cultures, surtout dans les régions tempérées, et nuiront à d’autres, surtout aux basses latitudes (degré élevé de confiance). Les températures maximales plus élevées nuiront généralement à de nombreuses cultures (degré élevé de confiance).[5.3.3]
Depuis le SAR, les progrès de la recherche sur les effets directs du CO2 suggèrent que les effets bénéfiques pourraient être plus importants dans certaines conditions de stress (températures plus élevées, sécheresse, etc.). Ces effets sont bien établis pour certaines cultures dans des conditions expérimentales mais encore imprécis dans les conditions suboptimales des exploitations. La recherche sur l’adaptation des cultures aux changements climatiques a bien progressé. Des mesures d’adaptation agronomique peu coûteuses, à l’échelle des exploitations, telles que la modification des dates de plantation ou des choix de cultivars, ont été simulées de nombreuses fois dans les modèles de culture. Des mesures d’adaptation dirigée plus coûteuses, comme un changement d’affectation des terres ou le développement et l’utilisation d’infrastructure d’irrigation, ont été examinées dans un nombre limité mais croissant de modèles liés économie-culture, de modèles d’évaluation globale et de modèles économétriques.
La dégradation des sols et des ressources en eau est l’un des grands problèmes que devra surmonter l’agriculture mondiale. On a établi avec un degré élevé de confiance que cette dégradation s’intensifiera en raison des changements attendus dans les températures et les précipitations. On a constaté que l’utilisation et la gestion des terres ont une incidence plus forte sur l’état des sols que les effets indirects des changements climatiques. Par conséquent, l’adaptation a le potentiel d’atténuer de façon significative ces effets. Il est indispensable d’évaluer si la détérioration des ressources augmentera sensiblement les risques auxquels font face les populations agricoles et rurales vulnérables. [ 5.3.2, 5.3.4, 5.3.6].
La plupart des études mondiales et régionales prévoient une baisse des prix réels des produits agricoles en l’absence de changements climatiques. La confiance dans ces projections diminue avec le temps. On estime que l’incidence des changements climatiques sur l’agriculture se traduira par une légère variation du revenu mondial, soit une augmentation dans les régions plus développées et une hausse moindre ou une baisse dans le monde en développement (degré de confiance faible à moyen). La capacité d’atténuer ces effets par l’adaptation (agronomique et économique) variera d’une région à l’autre et dépendra énormément des ressources disponibles, notamment de la présence d’institutions stables et efficaces. [ 5.3.1, 5.3.5]
Selon la plupart des études, une hausse de la température annuelle moyenne de 2,5 °C ou plus ferait augmenter le prix des aliments (degré de confiance faible) à cause du ralentissement de l’expansion de la capacité agricole mondiale par rapport à la croissance de la demande mondiale. Pour un réchauffement moindre, les modèles d’évaluation de l’incidence mondiale ne peuvent distinguer les changements climatiques d’autres sources de changement. Certaines études mondiales récentes ont évalué l’impact économique sur les populations vulnérables, par exemple les petits exploitants et les consommateurs urbains défavorisés. Elles indiquent que les changements climatiques abaisseront les revenus des populations vulnérables et augmenteront, en valeur absolue, le nombre de personnes menacées par la famine (degré de confiance faible). [5.3.5, 5.3.6]
En l’absence d’adaptation autonome, l’augmentation du nombre d’événements extrêmes devrait accroître la mortalité du bétail liée au stress thermique, même si des hivers plus chauds pourraient réduire la mortalité néonatale aux latitudes tempérées (établi mais incomplet). Les stratégies mises en œuvre pour favoriser l’adaptation du bétail au stress physiologique dû au réchauffement sont efficaces, mais les recherches en la matière souffrent d’un manque d’expérimentation et de simulation. [5.3.3]
S’agissant des estimations numériques précises de l’incidence des changements climatiques sur la production, les revenus et les prix, obtenues au moyen de modèles larges et globaux d’évaluation, le degré de confiance est faible en raison de plusieurs incertitudes persistantes. Les modèles sont très sensibles à certains paramètres qui ont fait l’objet d’analyses, mais il n’a pas été fait état d’une sensibilité à un grand nombre d’autres paramètres. Il reste aussi les incertitudes suivantes : ampleur et persistance des effets de l’élévation de la concentration atmosphérique de CO2 sur le rendement des cultures dans des conditions d’exploitation réalistes, évolution des pertes de cultures et de bétail imputables aux parasites, variabilité spatiale de la réaction des cultures aux changements climatiques, et effets de l’évolution de la variabilité climatique et des événements extrêmes sur les cultures et le bétail. [Encadré 5-3]
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