Les établissements humains intègrent de nombreux effets ressentis initialement dans d’autres secteurs et diffèrent les uns des autres par leur emplacement géographique, leur taille, le contexte économique et les capacités politiques ou institutionnelles. En conséquence, toute affirmation générale sur l’importance du climat ou des changements climatiques devrait être assortie d’une foule d’exceptions. On peut toutefois expliquer certains écarts dans les effets attendus en classant les établissements humains selon les voies par lesquelles le climat pourrait les toucher, selon leur taille ou d’autres paramètres physiques évidents, et selon leur adaptabilité (richesse, éducation de la population, capacité technologique ou institutionnelle). [7.2]
Les établissements humains sont touchés par le climat de trois manières :
Le tableau TS 3 classe plusieurs types de changements environnementaux imputables au climat et examinés dans les publications sur le climat et les établissements humains. Il renferme trois types d’établissements, correspondant aux trois voies principales d’incidence du climat. L’impact correspond au mécanisme de l’effet. Un établissement donné peut donc être touché de manière positive par les effets de l’évolution du climat sur ses ressources (par exemple, augmentation de la production agricole) et de façon négative par les effets sur son infrastructure (inondations plus fréquentes de ses réseaux de distribution d’eau, surcharge du réseau électrique, etc.). L’intensité des effets pourrait être relativement différente selon le type d’établissement (les villes de l’intérieur des terres ne ressentent pas directement les conséquences de l’élévation du niveau de la mer); les effets sont classés par leur importance. La plupart des textes publiés en la matière reposent sur des scénarios de doublement du CO2 ou sur des études qui décrivent l’impact des événements climatiques actuels (analogues), mais dans le contexte des scénarios d’état transitoire du GIEC. [7.1]
Tableau TS 3 : Incidence des changements climatiques sur les établissements humains, par type d’incidence et par type d’établissement (mécanismes d’incidence).a,b | |||||||||||||
Type d’établissement, cote d’importance
et référence |
|||||||||||||
Dépendant des ressources
(Effets sur les ressources) |
Côtier-fluvial-montagneux
(Effets sur les bâtiments et l’infrastructure) |
Urbain 1 M + (Effets
sur la population) |
Urbain <1 M (Effets sur la population) |
||||||||||
Type d’impact | Urbain capacité élevée |
Urbain capacité faible |
Rural capacité élevée |
Rural capacité faible |
Urbain capacité élevée |
Urbain capacité faible |
Rural capacité élevée |
Rural capacité faible |
Capacité élevée |
Capacité faible |
Capacité élevée |
Capacité faible |
Degré de confiance c |
Inondations, glissements terrain | L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
M-H |
M-H |
M |
M-H |
M |
M-H |
**** |
Cyclone tropical | L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
M |
M-H |
L-M |
M |
L |
L-M |
*** |
Qualité de l’eau | L-M |
M |
L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
*** |
Elévation du niveau de la mer | L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
M |
M-H |
M |
M-H |
L |
L-M |
L |
L-M |
**** (** for resource-dependent) |
Vagues de chaleur/froid | L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
L-M |
L-M |
L-M |
L |
L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
*** (**** for urban) |
Pénurie d’eau | L |
L-M |
M |
M-H |
L |
L-M |
L-M |
M-H |
L |
M |
L-M |
M |
*** (** for urban) |
Incendies | L-M |
L-M |
L-M |
M-H |
L-M |
L-M |
L-M |
L-M |
L-M |
L-M |
L-M |
M |
* (*** for urban) |
Grêle, tempête de vent | L-M |
L-M |
L-M |
M-H |
L-M |
L-M |
L-M |
M |
L-M |
L-M |
L-M |
L-M |
** |
Productivité agricole, forêts, pêche | L-M |
L-M |
L-M |
M-H |
L |
L |
L |
L |
L |
L-M |
L-M |
M |
*** |
Pollution de l’air | L-M |
L-M |
L |
L |
|
|
|
|
L-M |
M-H |
L-M |
M-H |
*** |
Fonte du pergélisol | L |
L |
L-M |
L-M |
L |
L |
L |
L |
|
|
L-M |
L-M |
**** |
Ilots thermiques | L |
L |
|
|
L |
L |
|
|
M |
L-M |
L-M |
L-M |
*** |
a. Les valeurs indiquées
dans les cellules ont été attribuées par les auteurs sur la base de données
directes présentées dans les publications ou de déductions à partir des
incidences figurant dans d’autres cellules. Le type de caractère précise
les sources : gras pour les données ou les études directes, italique pour
les déductions directes à partir d'incidences similaires, et ordinaire pour
une conclusion logique selon le type d’établissement, qui ne peut toutefois
être corroborée directement d’une étude ou déduite d’autres impacts. b. Cotes d’importance : Faible (F) = les incidences sont à peine perceptibles ou faciles à surmonter; Modérée (M) = les incidences sont évidentes mais ne créent pas de perturbation et peuvent nécessiter des dépenses importantes ou créer des difficultés d’adaptation; Elevé (E) = les incidences créent beaucoup de perturbations et risquent de ne pas être surmontées ou l’adaptation est tellement coûteuse qu’elle crée des perturbations (impacts généralement basés sur des scénarios de doublement du CO2 ou sur des études qui décrivent l’impact des événements climatiques actuels, mais dans le contexte des scénarios d’état transitoire du GIEC pour la deuxième moitié du XXIe siècle). Veuillez noter que «Urbain 1 M +» et «Urbain < 1 M» désignent respectivement une population supérieure et inférieure à un million. c. Voir à la section 1.4 du Résumé technique l’explication des degrés de confiance. |
Les changements climatiques peuvent créer des conditions locales et régionales de déficit et de surplus d’eau, parfois de façon saisonnière dans la même zone géographique. Les effets graves les plus courants sont les inondations, les glissements de terrain, les coulées de boue et les avalanches dus à l’intensification des pluies et à l’élévation du niveau de la mer. De plus en plus d’auteurs suggèrent qu’une grande variété d’établissements, dans presque toutes les zones climatiques, pourraient être touchés (établi mais incomplet). Les établissements côtiers et fluviaux sont particulièrement menacés, mais l’inondation des villes pourrait créer des problèmes si les collecteurs d’eaux pluviales, les réseaux d’approvisionnement en eau et les systèmes de gestion des déchets n’ont pas une capacité suffisante ou une technologie assez élaborée (construction en dur classique, conception moderne). La deuxième menace par son importance vient des cyclones tropicaux (ouragans ou typhons) dont le pic d’intensité pourrait augmenter dans un milieu plus chaud. Les cyclones tropicaux combinent les effets des fortes précipitations, des vents forts et des ondes de tempête sur le littoral et peuvent avoir des répercussions loin dans les terres, mais ils ne sont pas aussi répandus que les inondations et les glissements de terrain. Des dizaines de millions de personnes vivent dans des établissements menacés. Ainsi, le nombre moyen de personnes qui pourraient être victimes d’une inondation lors des ondes de tempêtes côtières augmente fortement (de 75 à 200 millions de personnes, selon les mesures d’adaptation) avec les scénarios moyens d’élévation du niveau de la mer (40 cm d’ici 2080), par rapport aux scénarios sans élévation du niveau de la mer. On a estimé les dommages potentiels causés à l’infrastructure côtière par la montée des eaux à plusieurs dizaines de milliards de dollars pour des pays comme l’Egypte, la Pologne et le Viet Nam. Au milieu du tableau TS 3 figurent les effets des vagues de chaleur ou de froid qui peuvent perturber les ressources (par exemple l’agriculture), la santé et la demande d’énergie pour le chauffage et la climatisation. Les impacts sur l’environnement, tels que la détérioration de la qualité de l’air et de l’eau, apparaissent également. Les tempêtes de vent, les pénuries d’eau et les incendies devraient être modérément importants dans de nombreuses régions. A l’extrémité inférieure se trouvent les impacts tels que la fonte du pergélisol et les effets d’îlot thermique qui, même s’ils sont importants localement, ne devraient pas concerner une grande variété d’établissements ou sont moins sévères quand on tient compte de l’adaptation. [7.2, 7.3]
Le réchauffement mondial va sans doute augmenter la demande d’énergie pour la climatisation et la diminuer pour le chauffage. Le nombre plus important de vagues de chaleur accroît la demande en climatisation, le nombre moins important de vagues de froid réduit la demande en chauffage. L’effet net attendu sur la consommation annuelle d’énergie dépend du scénario et de l’emplacement. L’adaptation des établissements humains, des systèmes énergétiques et de l’industrie aux changements climatiques constitue (dans certains cas) un défi pour l’aménagement et l’exploitation des établissements lorsque les conditions météorologiques sont plus rudes et offre des occasions de tirer parti (dans d’autres cas) de climats plus doux. On sait, par exemple, que les réseaux de transport d’électricité sont sensibles aux événements extrêmes tels que les cyclones tropicaux, les tornades et les tempêtes de verglas. La capacité locale de limiter les risques pour l’environnement ou leurs conséquences sanitaires dans tout établissement renvoie généralement à la capacité de s’adapter aux changements climatiques, sauf si l’adaptation exige des investissements particulièrement lourds dans l’infrastructure. Si le climat local est plus chaud, il faudra s’adapter à un nouvel environnement et non pas seulement à des températures plus élevées. Les spécialistes du milieu urbain conviennent que l’adaptation ne peut réussir sans un leadership local, compétent sur le plan technique et institutionnel, bénéficiant d’un appui politique et ayant facilement accès aux ressources nationales. [7.2, 7.3, 7.4, 7.5]
Les options possibles comprennent la planification des établissements et de leur infrastructure, le choix de l’emplacement des installations industrielles et la prise de décisions de même nature à long terme en vue de limiter les effets d’événements dont la probabilité est faible (mais en hausse) et les conséquences graves (et peut-être en augmentation). De nombreuses techniques classiques et modernes peuvent contribuer à une meilleure planification et gestion de l’environnement, notamment les mécanismes de lutte contre la pollution, de gestion de la demande et de réduction des déchets basés sur le marché, le zonage mixte, la planification des transports (avec des aménagements pour les piétons et les cyclistes), les études d’impact environnemental, les études de capacité, les plans stratégiques pour l’environnement, les procédures d’audit environnemental et les rapports sur l’état de l’environnement. De nombreuses villes ont combiné ces stratégies dans des programmes «Action 21 locale», qui abordent souvent une série de problèmes urbains susceptibles d’être en étroite interaction avec les changements climatiques futurs. [7.2, 7.5]
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