F.6 Projections pour l’évolution future de la circulation thermohaline
La plupart des modèles mettent en évidence un affaiblissement
de la circulation thermohaline dans l’hémisphère Nord, qui
contribue à réduire le réchauffement en surface dans la partie
septentrionale de l’Atlantique Nord. Même dans les modèles
où la circulation thermohaline diminue d’intensité, le réchauffement
se poursuit en Europe par suite de l’accroissement des gaz à effet
de serre. Dans les expériences où la concentration de gaz à
effet de serre dans l’atmosphère se stabilise à deux fois
son niveau actuel, on prévoit que, dans l’Atlantique Nord, la circulation
thermohaline se rétablira en l’espace d’un à plusieurs
siècles. La circulation thermohaline pourrait cependant disparaître
complètement dans l’un ou l’autre des hémisphères
pour peu que le taux de variation du forçage radiatif soit assez élevé
pendant une période suffisamment longue. Les modèles indiquent qu’en
s’atténuant, la circulation thermohaline devient plus sensible aux
perturbations et que cette instabilité peut contribuer à rendre
sa disparition plus probable. Cependant, il est encore trop tôt pour affirmer
avec certitude que la disparition irréversible de la circulation thermohaline
est probable ou non ou pour préciser à quel seuil elle pourrait
se produire et quelles en pourraient être les conséquences pour le
climat. Pour l’heure, aucune des projections obtenues à l’aide
de modèles couplés ne fait état d’une disparition totale
de la circulation thermohaline d’ici à 2100. Si la circulation thermohaline
dans l’Atlantique Nord s’affaiblit dans la plupart des modèles,
les rôles relatifs de la chaleur en surface et des flux d’eau douce
varient d’un modèle à l’autre. Les variations de la
tension du vent ne semblent jouer qu’un rôle mineur dans la réaction
transitoire.
F.7 Projections pour l’évolution future des modes de
variabilité naturelle
Nombre de modèles présentent une réponse moyenne de
type El Niño dans la zone tropicale du Pacifique, avec une élévation
projetée de la température de la mer en surface plus marquée
dans la partie centrale et orientale du Pacifique équatorial que dans
sa partie occidentale et un déplacement moyen concomitant des précipitations
vers l’est. Bien que de nombreux modèles indiquent une évolution
de type El Niño des températures moyennes de la mer en
surface dans la zone tropicale du Pacifique, la cause en est incertaine. Cette
évolution a été reliée à des variations du
forçage radiatif dû aux nuages et/ou à l’amortissement
évaporatif du gradient est-ouest de la température de la mer en
surface dans certains modèles. La confiance dans les projections pour
l’évolution future de la fréquence, de l’amplitude
et de la configuration spatiale des épisodes El Niño
dans la bande tropicale du Pacifique est tempérée par certaines
imperfections des simulations de ce phénomène dans les modèles
complexes. Les projections actuelles indiquent peu de changement ou une légère
augmentation d’amplitude des épisodes El Niño au
cours des 100 prochaines années. Toutefois, même si ce phénomène
ne varie guère en amplitude, le réchauffement de la planète
risque de déboucher sur une accentuation des phénomènes
extrêmes d’assèchement et de fortes précipitations
et sur un accroissement des risques de sécheresse et d’inondation
qui vont de pair avec El Niño dans de nombreuses régions.
Il est également probable que le réchauffement lié à
un accroissement des concentrations de gaz à effet de serre entraînera
une variabilité accrue des précipitations résultant de
la mousson d’été en Asie. Les variations de la durée
moyenne et de l’intensité de la mousson dépendent des données
retenues dans les scénarios d’émissions. La confiance en
de telles projections est limitée par la fiabilité parfois aléatoire
des simulations par les modèles climatiques de l’évolution
saisonnière détaillée des moussons. De plus, les avis sont
partagés quant aux changements de fréquence ou de structure des
modes de variabilité naturels tels que l’oscillation nord-atlantique;
autrement dit, l’ampleur et le caractère des changements diffèrent
selon les modèles.
F.8 Projections pour l’évolution future des glaces terrestres
(glaciers, calottes glaciaires et nappes glaciaires), des glaces de mer et de
la couverture neigeuse
Le recul général des glaciers et des calottes glaciaires se poursuivra
au XXIe siècle, et l’on prévoit que, dans l’hémisphère
Nord, la couverture neigeuse ainsi que les glaces de mer continueront de diminuer.
Des méthodes ont été mises au point récemment
pour estimer la fonte des glaciers sur la base de configurations saisonnières
et géographiques des variations de la température de l’air
en surface obtenues à partir d’expériences de simulation MCGAO.
Il ressort d’études de modélisation que, en moyenne et à
l’échelle du globe, l’évolution de la masse glaciaire
est davantage fonction des variations de la température que des variations
des précipitations. La nappe glaciaire de l’Antarctique devrait
augmenter de masse par suite de l’accroissement des précipitations,
tandis que celle du Groenland devrait perdre de sa masse, l’accroissement
des précipitations ne suffisant pas en ce cas à compenser l’augmentation
du ruissellement. La nappe glaciaire de l’ouest de l’Antarctique
a retenu particulièrement l’attention, parce qu’elle contient
assez de glace pour relever le niveau de la mer de six mètres et qu’il
semble que les instabilités découlant du fait que cette nappe repose
sur un substratum situé au-dessous du niveau de la mer pourraient provoquer
un déversement rapide de la glace après désintégration
des plates-formes de glace voisines. Toutefois, une forte élévation
du niveau de la mer résultant d’un tel déversement est aujourd’hui
généralement considérée comme très improbable
au XXIe siècle, quoique l’on comprenne encore mal la dynamique du
phénomène en cause, surtout pour les projections à long terme.