La présente section contient un résumé actualisé des observations qui permettent de se faire une idée plus précise de la façon dont le système climatique a évolué dans le passé. Un grand nombre des variables du système climatique ont été mesurées directement et constituent donc le «relevé instrumental». Ainsi, c’est vers le milieu du XIXe siècle qu’ont commencé à se généraliser les mesures directes de la température en surface. Depuis une centaine d’années, on procède également, sur presque toute la surface du globe, à des observations d’autres variables météorologiques telles que la hauteur de précipitation ou la vitesse et la direction du vent. Le niveau de la mer a également été mesuré pendant plus d’un siècle en certains endroits, mais le réseau de marégraphes en service pendant une période suffisamment longue n’a qu’une couverture limitée. Par ailleurs, on n’effectue des observations en altitude de façon systématique que depuis la fin des années 40. On dispose également de registres d’observations océaniques en surface effectuées à partir de navires depuis le milieu du XIXe siècle, et à partir de bouées spéciales depuis la fin des années 70. De plus, on a procédé à des mesures de la température sous la surface des océans à une échelle quasi mondiale depuis la fin des années 40. Et depuis la fin des années 70, les données transmises par les satellites d’observation de la Terre ont permis d’entreprendre un large éventail d’observations des diverses composantes du système climatique à l’échelle du globe. En outre, un nombre croissant de données paléoclimatiques, tirées entre autres des arbres, des coraux, des sédiments et des glaces, nous donnent des informations sur le climat qui existait sur Terre il y a des siècles, voire des millénaires.
La présente section met particulièrement l’accent sur nos connaissances actuelles au sujet de l’évolution antérieure de certaines variables climatiques essentielles telles que la température, la hauteur de précipitation, l’humidité de l’air, l’enneigement, l’étendue des glaces de terre et de mer, le niveau de la mer, les régimes des circulations atmosphérique et océanique, les phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes ou les caractéristiques générales de la variabilité du climat. En conclusion, on compare les tendances révélées par ces divers indicateurs climatiques afin d’en dégager une éventuelle vue d’ensemble. Le degré de cohérence interne est un facteur critique pour la détermination du niveau de fiabilité de notre compréhension actuelle du système climatique.
Figure TS 2 — Anomalies relevées dans les températures annuelles combinées de l’air à la surface de la Terre et de la surface de la mer de 1861 à 2000, par rapport à la période 1961-1990. Deux incertitudes d’écart type sont représentées sous forme de barres sur la température annuelle. [Fondée sur la Figure 2.7c] |
Figure TS 3 — Tendances de la température annuelle pour les périodes respectives de 1901-2000, 1910 1945, 1946-1975 et 1976-2000. Les tendances sont représentées par la surface des cercles, le blanc représentant une augmentation, le noir une diminution et le gris un changement faible ou nul. Les tendances ont été calculées à partir des moyennes des anomalies annuelles réparties sur une grille, le critère étant que les calculs doivent inclure au moins 10 mois de données. Pour la période 1901 2000, les tendances n’ont été calculées que pour les cases de la grille qui contiennent des anomalies annuelles enregistrées pour au moins 66 des 100 ans. Pour les périodes plus courtes (1910-1945, 1946-1975 et 1976-2000), le nombre minimum d’années requis est 24, 20 et 16 ans respectivement. [Fondée sur la Figure 2.9] |
Les profils régionaux du réchauffement propres à la
première partie du XXe siècle diffèrent nettement de ceux
qu’on observe dans sa deuxième partie. La figure
TS 3 illustre les manifestations régionales du réchauffement
pour l’ensemble du XXe siècle ainsi que pour trois périodes
particulières. La période de réchauffement la plus récente
(1976-1999) a concerné la presque totalité de la planète,
bien que les plus fortes hausses aient été enregistrées
aux latitudes moyennes et élevées des continents de l’hémisphère
Nord. Si l’on observe un refroidissement s’étendant sur toute
l’année dans le nord-ouest de l’Atlantique Nord et le centre
du Pacifique Nord, la tendance au refroidissement s’est dernièrement
inversée dans l’Atlantique Nord. Il est apparu que l’évolution
récente des températures à l’échelon régional
était en partie liée aux différentes phases d’oscillations
atmosphériques ou océaniques telles que l’oscillation atlantique
nord-arctique et peut-être l’oscillation pacifique décennale.
Sur quelques décennies, ces tendances régionales peuvent donc
être fortement influencées par la variabilité régionale
du système climatique et s’écarter sensiblement de la moyenne
mondiale. Ainsi, si le réchauffement a d’abord concerné
l’Atlantique Nord pendant la période 1910- 1945, cette zone, à
l’instar de la majeure partie de l’hémisphère Nord,
s’est considérablement refroidie durant la période 1946-
1975, alors qu’un réchauffement était observé dans
une grande partie de l’hémisphère Sud.
Il ressort de nouvelles analyses que, depuis la fin des années
50,
le contenu calorifique des océans de la planète a sensiblement
augmenté. Plus de la moitié de ce réchauffement s’est
produit dans les 300 premiers mètres des eaux océaniques, la température
de cette couche augmentant de quelque 0,04 °C par décennie.
Les nouvelles analyses des températures maximales et minimales relevées quotidiennement à la surface des terres émergées pendant la période 1950-1993 continuent de montrer que cette expression de l’amplitude thermique diurne est en nette diminution, quoique ce ne soit pas le cas partout. En moyenne, les températures minimales augmentent environ deux fois plus vite que les températures maximales (0,2 °C contre 0,1 °C par décennie).
Il est probable que le réchauffement qui s’est produit au XXe
siècle, tant par son ampleur que par sa durée, est sans précédent
depuis mille ans. Les années 90 représentent sans doute la décennie
la plus chaude du millénaire dans l’hémisphère Nord,
et 1998 a probablement été l’année record à
cet égard. Notre compréhension des fluctuations de la température
durant le dernier millénaire a considérablement progressé,
notamment grâce à la synthèse des diverses reconstitutions
de cette évolution. Le nouveau relevé détaillé des
températures dans l’hémisphère Nord est présenté
à la figure TS 5. Comme le montre les données,
une période relativement chaude, allant du XIe au XIVe siècle,
a précédé une période relativement froide, allant
du XVe au XIXe siècle. Par contre, ces données ne confirment pas
la synchronicité à l’échelle planétaire de
ces périodes connues respectivement sous les noms de «période
de réchauffement médiéval» et «petit âge
glaciaire». Comme l’indique la figure TS
5, le réchauffement de l’hémisphère Nord au XXe
siècle, tant par son ampleur que par sa durée, semble avoir été
sans précédent depuis mille ans et ne peut donc être considéré
comme un simple retour à la normale après le «petit âge
glaciaire». Ces analyses sont confirmées par l’analyse de
sensibilité de la représentativité spatiale des données
paléoclimatiques disponibles, qui indique que le réchauffement
observé ces dix dernières années outrepasse l’intervalle
de confiance de 95 pour cent lié à l’incertitude en matière
de température, même pour les périodes les plus chaudes
du dernier millénaire. Par ailleurs, plusieurs analyses récentes
semblent montrer que les températures observées dans l’hémisphère
Nord durant la dernière décennie ont été les plus
élevées des six à dix derniers siècles. Il s’agit
là de la période pour laquelle on peut calculer des températures
annuelles en se fondant sur les données déduites, à l’échelle
de l’hémisphère, des anneaux de croissance des arbres, des
carottes glaciaires et des coraux ainsi que d’autres données indirectes
à «résolution» annuelle. La rareté des données
explique que l’on connaisse moins bien les moyennes annuelles pour la
période antérieure au dernier millénaire et qu’on
sache peu de choses sur les conditions qui ont prédominé dans
la plus grande partie de l’hémisphère Sud avant 1861.
Il est probable que la dernière période glaciaire et la déglaciation
qui a suivi (il y a 100 000 à 10 000 ans environ) ont donné lieu
à d’importantes et rapides variations décennales de la température,
en particulier aux latitudes élevées de l’hémisphère
Nord. Pendant la déglaciation, des hausses locales de 5 à
10 °C de la température se sont probablement produites, dans certains
endroits, en l’espace de quelques décennies seulement. On dispose
de données de plus en plus nombreuses qui montrent que les 10 000 dernières
années ont été marquées par de fortes et rapides
variations de la température à l’échelle régionale,
s’inscrivant dans la variabilité naturelle du climat.
Figure TS 4— a) Série chronologique des anomalies de températures saisonnières de la troposphère, fondée sur les données de ballons sondes, de satellites et de mesures à la surface. b) Série chronologique des anomalies de températures saisonnières de la basse stratosphère, fondée sur les données de ballons-sondes et de satellites. [Fondée sur la Figure 2.12] |
Figure TS 5 — Reconstitution des températures de l’hémisphère Nord (HN) du millénaire (gris foncé - données tirées des cercles de croissance des arbres, des coraux, de carottes glaciaires et de relevés historiques) et données instrumentales (bleu) pour la période 1000-1999. Une version ajustée des données HN (noir) et deux limites d’écart type (grisé) sont également indiquées. [Fondée sur la Figure 2.20] |
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